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Comment coincer le tentateur ?

Retrouvez l’évangile du 9 mars 2014, premier dimanche de carême (année A), l’homélieComment coincer le tentateur ? du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

Article mis en ligne le 12 mars 2014

par Père Christophe Kerhardy sj

Retrouvez l’évangile du 9 mars 2014, premier dimanche de carême (année A), l’homélie du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

 L’homélie

Dans bien des domaines, l’humanité a fait des progrès considérables, mais est-elle parvenue à dominer toutes les tentations qui se présentent à elle ? Comment coincer le tentateur qui joue avec nos manques, nos besoins et nos envies ? Eh bien suivez Jésus.

Jésus, sous l’impulsion de l’Esprit Saint, part au désert. Le désert est par excellence un lieu ambivalent : c’est le lieu où l’on se retire pour prier, le lieu des rencontres inattendues mais aussi des grandes solitudes, et, pour Israël, ce fut le lieu de la confiance, et en même temps le lieu de la récrimination contre Dieu, c’est donc le cadre rêvé pour des tentations !

Jésus y demeure quarante jours, quarante c’est la racine même du mot carême. Ce chiffre renvoie aux quarante années de marche au désert, quarante ans où la faim, la soif et le manque tiraillent Israël avant son arrivée en Terre promise. Jésus lui aussi est poussé dans ses retranchements. Après quarante jours de prière et de jeûne, il est vulnérable, affaibli et c’est alors que le tentateur entre en scène.

Par trois fois le tentateur va essayer de détourner Jésus de sa mission en lui suggérant trois images de messie bien décalées par rapport au visage du Messie de Pâques.

Première tentation : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains ! ». C’est le messianisme du ventre où Dieu devrait répondre à nos besoins, sinon, il n’est pas à la hauteur. Mais le pain n’est-il pas le fruit du travail et des efforts des hommes ? Jésus ne transformera pas les pierres en pain. À Pâque, c’est son corps qu’il offrira pour le salut du monde. Ce sera le jeudi saint et l’institution d’un messianisme eucharistique. Celui que nous célébrons ici, chaque dimanche, lorsque nous venons nous nourrir de la Parole de Dieu et du corps du Seigneur, car l’homme ne se nourrit pas seulement de pain.

Deuxième tentation : « Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas du sommet du Temple ! ». Ce saut dans le vide, sans parapente comme à Saint-Leu, ce serait le messianisme des planeurs ; en voyant Jésus voleter comme un oiseau, planant au-dessus du Temple, chacun serait convaincu qu’il est Dieu ; ce faisant, Jésus aurait obligé les hommes à croire en lui ! Jésus ne se jettera pas du haut du Temple, il en sera plutôt chassé par des hommes incrédules. Ce sera le vendredi saint, l’heure du messie qui ne plane pas mais qui tombe à terre et est cloué en croix pour dévoiler comment nous sommes portés par l’amour et le pardon de Dieu.

Troisième tentation : « Tous les royaumes, je te les donne, si tu te prosternes et m’adores ! ». Ce serait le messianisme politique. Dans ce cas, le Règne de Dieu s’instaurerait à coup de colonisation des espaces, moyennant quelques courbettes devant le Mauvais. Voyez ce qui se passe quand un homme contraint une nation à être à ses pieds. Bien loin de se confondre avec ces roitelets qui font sentir leur pouvoir, la grandeur de Jésus repose dans son abaissement qui ne se mêle à aucune forme de domination. C’est pourquoi Dieu l’exaltera. Ce sera le jour de Pâques, le jour de la victoire de Jésus qui aura semé la vie en se répandant dans le sombre territoire de la mort.

Messianisme eucharistique, messianisme d’amour et de pardon, messianisme de vie, voilà ce que Jésus accomplit. Nos grandes tentations seraient de fausser les pistes du salut et d’attendre un messie qui corresponde davantage à nos envies d’abondance, de prestige ou de puissance. Volontiers nous gommerions de l’Évangile tout ce qui est humilité et passage par la Croix. Volontiers, comme Adam, nous voudrions prendre la place de Dieu.

Jésus sait que notre histoire est faite de tentations répétées et de chutes, mais il croit que nous sommes capables de lutter contre le tentateur. Pour ce faire, il nous montre la tactique.

Retenez bien l’expression « il est écrit ». Cette formule court tout au long de l’évangile d’aujourd’hui. Face aux suggestions de l’Adversaire, Jésus s’appuie sur la Parole de Dieu et ne se laisse pas tromper par des promesses mirifiques et fallacieuses. Au paradis, le tentateur, le père du mensonge, avait réussi à tromper Ève, mais il échoue avec Jésus. Nous remarquons que l’Écriture est son arme de résistance, quand il est tenté, il laisse Dieu répondre à sa place. C’est bien la raison pour laquelle nous devrions nous laisser pétrir d’Écriture.

Nous ne sommes pas le Messie mais nous sommes le peuple du Messie. Jésus a connu l’épreuve dans le désert aussitôt après son baptême, de même ceux qui ont été baptisés au nom de Jésus-Crhist doivent être prêts à affronter l’épreuve. Face au mauvais, saurons-nous devenir un peuple eucharistique, un peuple montrant beaucoup d’amour et de pardon, un peuple de vivants. C’est tout l’enjeu du carême. Et n’oubliez pas qu’il est écrit : « Priez pour ne pas entrer en tentation ».

(Illustrations : James B. Janknegt)