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Jésuites à La Réunion
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Lazare, alon bat karé !

Retrouvez ici l’évangile du 6 avril 2014, cinquième dimanche de carême (année A), l’homélie du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

Article mis en ligne le 10 avril 2014

par Père Christophe Kerhardy sj

Retrouvez ici l’évangile du 6 avril 2014, cinquième dimanche de carême (année A), l’homélie du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

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 L’homélie

(Bernadette Lopez, evangile-et-peinture)

Aujourd’hui, une voix ferme s’élève devant le tombeau : « Lazare, viens dehors ! ». Lazare, alon bat karé... Si en nous un Lazare sommeille dans la mort, Dieu veut le réveiller. Pourquoi ? Pour que nous voyions sa gloire, c’est à dire pour que nous croyions en son amour qui n’abandonne personne à la mort.

Et quand Jésus voit paraître Lazare encore engoncé dans ses bandelettes, il ordonne qu’on l’en délie. « Déliez-le », dit Jésus. Autrement dit, il compte sur les autres pour finir le travail. J’entends ici en écho cette autre parole de Jésus : « Tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié au ciel ». Concrètement, cela se réalise par des gestes et des paroles qui encouragent, qui relèvent, qui pardonnent, qui espèrent. À cause du Christ et en son Nom, nous devons ouvrir à nos frères la porte de la vie, et Dieu sait si ce n’est pas un luxe quand tellement de gens se sentent écrasés, découragés ou abattus.

En sortant de son tombeau, Lazare prendrait-il de l’avance sur la résurrection de Jésus ? En fait, Jésus est le premier né d’entre les morts et c’est dans sa résurrection que nous sommes ressuscités. Alors disons que la réanimation de Lazare, quelques jours avant la Pâque, est une avance sur la victoire de Jésus contre la mort.

On présente souvent les choses ainsi : Jésus sachant qu’il allait mourir, entrouvre une fenêtre d’espoir. Il sait que le moral de ses troupes va chuter d’ici peu, alors, il envoie un peu de lumière avant que se déchaînent les ténèbres, il honore la vie avant sa propre mort...

Un enfant me disait un jour : « Mon Père, pour Jésus, la mort c’était facile, trois jours après il savait qu’il allait ressusciter ! »

Je ne crois pas que les choses étaient aussi sereines dans le cœur de Jésus. Au contraire, on le voit bouleversé par le chagrin de Marthe et de Marie, touché par leur deuil. Devant le tombeau, il ne crie pas victoire tu régneras, il pleure son ami ; il pleure sur ce gâchis qu’est la mort, il pleure avec ceux qui pleurent, il pleure avec nous qui pleurons la disparition d’un proche. Jésus n’est pas un homme froid et sans cœur, et notre foi, aussi solide qu’elle soit, n’effacera pas les émotions, ni les nôtres, ni celles de Dieu qui s’afflige de voir mourir les siens.

Je pense plutôt que c’est au cœur des affects que la foi se fraye un chemin et se consolide. Voyez le dialogue entre Jésus et Marthe. Marthe commence par faire une remarque : « Si tu avais été là, mon frère serait pas mort ». Vous diriez ça à Dieu ? Un pas de plus et nous basculons dans le discours des sceptiques : « Si Dieu était là, il n’y aurait pas de maladie, pas de deuil, pas de mort ! ». Oui, nos fragilités, nos échecs et nos morts peuvent nous conduire à douter de Dieu.

Mais Marthe fait un pas de plus : « Maintenant encore, je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l’accordera ». Elle avait une idée sur Jésus : on disait, on racontait qu’il fait des miracles, alors, il pourrait en faire un pour elle, histoire de montrer ses pouvoirs extraordinaires et un peu merveilleux. Mais Jésus va l’entraîner ailleurs : « Ton frère ressuscitera ». Et voilà qu’avec Marthe nous passons au niveau du croyant moyen qui affirme : « Oui, je sais qu’il ressuscitera au dernier jour ! ». Elle en sait des choses, Marthe, elle a lu Ezéchiel et retenu cette promesse : « Je vais ouvrir vos tombeaux, je vous en ferai sortir –parole du Seigneur ». Elle en sait tellement qu’on se demande ce que Jésus peut lui apprendre de plus !

Et soudain, Jésus va poser une date sur le vieux texte du prophète, et montrer que le dernier jour, c’est maintenant ! C’est là un grand moment de l’Évangile où l’on voit la vie chasser la mort. Jésus qui est la Résurrection ne va pas renvoyer la vie aux calendes grecques, car pour Dieu, donner la vie, c’est dans ses gènes, maintenant et pour les siècles des siècles.

Alors cette Marthe et Marie, et leur frère Lazare, c’est l’Église qui célèbre la vie perdue et retrouvée, cette Marthe, Marie et Lazare, c’est nous, les amis de Jésus, avec nos larmes au coin des yeux quand la mort nous affecte, c’est nous avec nos liens qui nous empêchent d’être pleinement vivants, et cependant c’est nous qui croyons que la résurrection est une grâce déjà offerte. Cette grâce a été payée au prix fort puisque Jésus a tout donné pour le relèvement de ses amis. Par conséquent, Celui qui croit en lui, même s’il meurt, vivra. Mieux, il ne mourra jamais. Crois-tu cela ?

Oui Seigneur, nous croyons, mais fais grandir en nous la foi. Une foi active, une foi qui délie et libère l’homme, une foi qui multiplie les gestes en faveur de la vie, une foi qui participe à l’œuvre du Christ qui est venu pour que « tous les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance ».