Film belge de Jean-Pierre et Luc Dardenne (2005) avec Jérémie Renier, Déborah François, Samuel De Rick. Palme d’or 2005 au Festival de Cannes. Pas de sous-titrage. Durée : 1h35.

Bruno, 20 ans, et Sonia, 18 ans, vivent de l’allocation perçue par la jeune fille et des larcins commis par le garçon et sa bande. Sonia vient de donner naissance à Jimmy, leur enfant. L’insouciant Bruno doit alors apprendre à devenir père…

L’on retrouve ici Jérémie Renier, acteur récurrent dans les films des frères Dardenne. Il incarne ici Bruno, jeune sans emploi mais pas désœuvré : il est en activité incessante, toujours en marche, entrant, sortant, vendant – car c’est en volant ou faisant voler puis en marchandant qu’il se procure de l’argent. Il n’a pourtant rien d’un grand malfaiteur : il semble plutôt n’avoir jamais grandi. Et s’il manie beaucoup d’argent, il n’en vit pas moins comme un sans domicile fixe, se réfugiant dans sa tanière, au bord du fleuve, ou quémandant une nuit chez des amis, dans un foyer.
Sonia (Déborah François) court, elle aussi, son nouveau-né dans les bras. Puis dans le landau acheté par Bruno. Mais si elle semble un peu plus mûre que Bruno, un peu plus préoccupée du bien être de Jimmy, elle n’en reste pas moins une adolescente un peu perdue, sans travail, sans famille.

Bruno n’a que Sonia, Sonia n’a que Bruno… et Jimmy. Le bébé va bouleverser l’équilibre entre eux. Parce que Sonia n’admettra évidemment pas que Bruno le vende – « Ben quoi, je pensais qu’on en ferait un autre », balbutie-t-il, penaud comme un gamin pris la main dans le pot de confiture. Rupture du couple. Mais sans Sonia, Bruno est seul, désespérément seul. Pour lui, les ennuis s’accumulent. Cet argent qu’il semblait se procurer si facilement vient à lui manquer. Sans un sou, le ventre creux, il tente un coup pour se refaire… c’est alors seulement, peut-être, que sa vie va basculer…

L’histoire dramatique de ces adolescents marginaux pointe notre société et ses faiblesses : manque de solidarité, égoïsme, recherche effrénée du profit… à quelles valeurs se raccrocher ? Bruno devra descendre très bas pour trouver les siennes.

Avec un art consommé du suspense, Jean-Pierre et Luc Dardenne réussissent ici l’exploit d’une œuvre dont le personnage principal n’est pas très sympathique. Comment finit-on par s’attacher à lui ? Par souhaiter un revirement de situation qui débouche sur la vie et l’extirpe de son existence misérable, sordide ? À chaque spectateur de répondre. Une chose est sûre : pour comprendre ce film qui a reçu en 2005 la Palme d’or à Cannes (la 2^e pour les frères Dardenne), il ne faut pas craindre de changer de point de vue, de se laisser « déplacer », de remettre en question ses propres certitudes. Ce qui, bien sûr, donnera matière à des échanges nourris après la projection.

La projection sera suivie d’un temps d’échanges.