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À la synagogue de Nazareth... Jésus annonce l’Évangile
Article mis en ligne le 29 janvier 2019
dernière modification le 2 mars 2019

par Père François Noiret sj

Retrouvez ici l’évangile du dimanche 27 janvier 2019, 3e dimanche du Temps ordinaire (année C) et l’homélie du père François Noiret à la chapelle du Sacré-Cœur.

Lire l’évangile du jour

L’homélie

Les premiers mots de l’évangile de Luc aujourd’hui ont pu nous surprendre. Quand on proclame l’évangile, nous avons l’habitude d’entendre Jésus parler, faire quelque miracle ; ici, c’est l’écrivain, saint Luc, qui s’adresse à un dénommé Théophile, que nous ne connaissons pas ; il lui explique pourquoi il écrit le livre qui va suivre, son évangile. C’est donc l’introduction au livre que nous allons entendre toute cette année, de dimanche en dimanche.

Il y a quatre évangiles, qui sont de loin les livres les plus importants de toute la Bible, même dans le Nouveau Testament : les autres livres, on les écoute assis sur son banc ou sur sa chaise, même les psaumes quand on les chante ; mais quand on lit l’évangile, on se lève, on se signe (le front, les lèvres, le cœur), on chante alléluia au début, ou même à la fin, le prêtre embrasse le livre – si l’évêque est là, on le porte à l’évêque qui l’embrasse lui-même -, et les jours plus solennels on apporte même deux cierges allumés et on encense le livre ouvert. On ne fait cela que pour l’évangile.

L’Église a sa pédagogie : elle nous apprend ainsi que les évangiles sont au-dessus de tous les autres livres. D’ailleurs, peut-être le savez-vous, dans un concile, ce n’est pas le pape qui préside, c’est le livre des évangiles qu’on dresse sur un fauteuil ! Car dans l’évangile, c’est le Christ lui-même qui parle, en direct si j’ose dire. Ce sont ses paroles qu’on entend, ses actions qui sont racontées.
Les plus anciens d’entre nous ont peut-être encore appris par cœur les évangiles des 52 dimanches de l’année et des grandes fêtes : on les apprenait par cœur au catéchisme jadis, et ainsi tous les catholiques connaissaient les évangiles, même ceux qui ne savaient pas lire. Et on dit que les catholiques ne connaissaient pas l’Écriture Sainte ! Ils l’apprenaient par cœur, dans toutes les langues et tous les patois, en breton en Bretagne, en malgache à Madagascar, et je ne sais pas si on les apprenait en créole à La Réunion, sinon ça aura manqué, car connaître ses évangiles, c’est le B A BA de l’évangélisation.

Entre parenthèses, vous, les grands-mères, vous pourriez faire un concours entre vos petits-enfants, à celui qui saura le mieux raconter l’évangile du dimanche, avec un une glace en prime ou un double dessert (à partager avec les autres pour qu’il n’y ait pas de jaloux !).

Donc, saint Luc, qui n’est pas un apôtre, qui n’est même pas un juif – c’est un médecin grec – a entendu raconter beaucoup d’histoires de Jésus et il a même lu plusieurs manuscrits qui les racontent, en particulier les évangiles de saint Marc et de saint Matthieu qui existaient déjà, mais écrits en araméen, pas encore traduits en grec ou en latin comme on ferait pour nous en anglais ou en français. Le plus ancien, c’est celui de saint Marc, qui était le secrétaire-interprète de saint Pierre, à Rome notamment. Il y avait aussi celui de saint Matthieu et d’autres qui n’ont pas été conservés, mais qui ont été intégrés à ceux que nous avons maintenant, comme va faire Luc justement.

Luc compare ces récits ; il voit qu’ils peuvent se compléter, qu’il faudrait harmoniser les différences, car chaque témoin raconte un peu différemment ce qu’il a vu et entendu, c’est normal : deux personnes qui ont vu la même chose la racontent chacune à sa façon. Et puis, Luc a envie d’en savoir davantage. Comme il écrit très bien le grec et qu’il est cultivé, il fait un vrai travail d’historien et d’écrivain, et il s’en explique pour commencer :
« Mon cher Théophile, plusieurs ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous tels que nous les ont transmis ceux qui dès le début furent les témoins oculaires et sont devenus les serviteurs de la Parole. C’est pourquoi j’ai décidé, moi aussi, après m’être soigneusement informé de tout depuis les origines d’en écrire pour toi un exposé suivi, afin que tu te rendes bien compte de la solidité des enseignements que tu as reçus. »

Le résultat, c’est le 3e évangile, avec sa suite, car Luc a continué son travail avec l’histoire de l’Église primitive, et c’est le livre des Actes des Apôtres qui fait suite à son évangile, aussi dédié à Théophile.

Ces récits sont donc des témoignages venus des témoins directs ; l’ordre des chapitres varie selon les quatre évangiles, mais on s’y retrouve et on peut les mettre en parallèle pour comparer ce que chacun dit, ce qui est fort intéressant. Ce genre de livre qui imprime les quatre évangiles en parallèle, vous pouvez vous le procurer à l’Arod, en français ; ça s’appelle une « synopse » ; cela vous aidera à comparer et à approfondir vos évangiles.

Pourquoi saint Luc s’est-il décidé à faire une recherche historique supplémentaire ? « Pour que tu te rendes bien compte de la solidité des enseignements que tu as reçus » quant tu étais catéchumène et qu’on t’a préparé au baptême. Cela veut dire qu’après le baptême, il faut toujours vérifier et approfondir l’enseignement reçu, le Credo en gros. Et pour cela, il y a les évangiles, sans parler de tous les autres livres de la Bible.

Et d’ailleurs que fait Jésus aussitôt après son baptême ? Il va au désert quarante jours, où il médite la Parole de Dieu (le diable argumente aussi très bien avec lui) et se prépare à sa mission, puis il va à Nazareth, à la synagogue, c’est l’évangile d’aujourd’hui ; et que fait-il à la synagogue ? Il déroule le rouleau du livre d’Isaïe et tombe sur ce passage qui concerne le Messie, qui le concerne :
« L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction » – c’est le Saint Esprit reçu au baptême – « Il m’a envoyé porter le Bonne Nouvelle aux pauvres » – c’est l’Évangile – « annoncer aux prisonniers leur libération, rendre la vue aux aveugles » – ce sont les guérisons opérées par Jésus – « annoncer une année de bienfaits accordée par le Seigneur » – c’est la vie publique de Jésus et la rédemption de l’humanité, c’est la sortie du carcan de l’ancienne Loi et la libération des consciences par la loi de grâce et de charité, autrement dit l’Évangile.

Il replie le livre, le rend au servant et s’assoit. Tous les yeux sont fixés sur lui. Il dit : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre », autrement dit : la Bonne Nouvelle est annoncée, c’est l’Évangile.

Il n’annonce pas un livre, il annonce l’Évangile, la Bonne Nouvelle ; c’est plus tard qu’on mettra tout cela par écrit et que ça fera nos quatre évangiles.

Il annonce l’Évangile : c’est une prophétie qui s’accomplit, et le signe – la preuve, en un sens – ce sont les miracles, les guérisons et la liberté spirituelle par rapport au carcan de l’ancienne Loi, celle de Moïse. Stupeur des gens, et en même temps exultation, joie : « Ils étaient dans l’admiration devant les paroles pleines de grâce qui sortaient de sa bouche », conclut le récit (verset 12, qu’on n’a pas lu aujourd’hui). Les difficultés viendront plus tard ; mais ça commence par la joie : l’évangile de Jésus fait vivre, libère, éclaire, délivre, il est une Bonne Nouvelle de Dieu pour nous les hommes.

Alors, quel sera notre programme d’année ? Lire l’évangile. Tous les combien ? Le samedi soir avant la messe du dimanche ? ou bien le dimanche soir, pour y revenir après l’avoir entendu à l’église ? Tout seul ou en famille ? Avec les enfants ou seulement les grands ? Ou bien chaque soir avant de s’endormir une belle histoire pour les plus petits ? ou bien chaque jour, quand j’ai quelques minutes, je lirai l’évangile du jour, même si je ne peux pas aller à la messe ?

Ou bien je l’entends à 7h15 sur Radio Arc-en-Ciel, mais je le médite moi-même pour y trouver encore autre chose que le Saint-Esprit me fera comprendre pour ma vie d’aujourd’hui ?

A chaque fois qu’on va lire un passage d’évangile, il faut d’abord prier un peu le Saint-Esprit et demander la grâce dont on a besoin, se disposer, être prêt à lire et à entendre — on ne lit pas l’évangile comme on lit le journal — et puis on lit un peu, on écoute, on regarde Jésus, ce qu’il dit, ce qu’il fait, les autres personnages, on admire, on pose des questions, on offre ses soucis. On prie avec l’Écriture, et Dieu nous enseigne, nous instruit et nous bénit, parce qu’il lui plait que nous soyons là en communion avec son Fils, puisque l’évangile, c’est le Christ : « C’est le Seigneur ! », Il est là !

Nous voici fin janvier ; on a fêté Noël, l’Épiphanie, le Baptême de Jésus, le premier signe à Cana, et maintenant Jésus commence les trois ans de sa vie publique : il annonce l’Évangile. Et nous aussi, nous commençons une année entière avec lui. Alors, tant qu’on est en janvier, encore une fois, Bonne Année, bonne lecture, priez et vous nous en direz des nouvelles ! Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ! Amen !