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Jésuites à La Réunion
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Le site des jésuites à La Réunion. La communauté de la Résidence du Sacré-Cœur, les activités de la chapelle de la Résidence et du Centre Saint-Ignace.

Sortons de nos « guerres des boutons »
Article mis en ligne le 27 septembre 2015
dernière modification le 13 octobre 2015

par Père Christophe Kerhardy sj

Retrouvez ici l’évangile du 27 septembre 2015, 26e dimanche du temps ordinaire (année B), l’homélie du père Christophe Kerhardy, et la prière universelle des fidèles de la Résidence du Sacré-Cœur.

 L’homélie

Quand des jeunes prennent des armes pour régler leurs comptes, comme cette semaine au Chaudron, nous ne sommes plus dans la gentille Guerre des boutons… Vous vous souvenez de la Guerre des boutons ; les jeunes de deux villages s’affrontent en permanence.

C’est un peu ce qui se passe dans l’évangile. Les apôtres viennent trouver Jésus et se plaignent que quelqu’un, qui n’appartient pas à leur groupe, a chassé des esprits mauvais en son nom. Qu’on soit vigilant sur les usages abusifs du nom de Jésus, qu’on se méfie des guérisseurs et des exorcistes marrons : d’accord. Cependant, quand l’Esprit-Saint se montre fécond au-delà du groupe des disciples, il faut s’en réjouir au lieu d’en être jaloux.

Nous savons tout le mal que la jalousie peut faire dans les familles, surtout au moment des héritages : dans le monde du travail, que d’envieux quand un autre reçoit une promotion ! Et je suis parfois amer quand je sens la jalousie s’infiltrer dans l’Église.

Déjà, au temps de Moïse, on voulait interdire à Eldad et Méhad de prophétiser. Mais Moïse avait bien perçu que c’était la jalousie qui animait les adversaires de ces deux jeunes, aussi il répondit : « Ah ! si Dieu pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ».

Pareillement, Jésus n’empêchera pas l’action de son groupe. Dieu n’est pas sectaire et on n’enchaîne pas le bon Esprit qui souffle où il veut. Ce qui compte pour lui, c’est le mieux-être, le mieux-vivre de tous. Et des hommes de bonne volonté, quoique non chrétiens, peuvent être de remarquables agents de l’Esprit. On les voit soucieux des plus faibles, on les voit engagés pour le progrès de la justice et de la paix, on les voit qui luttent contre le mal et la souffrance… Aujourd’hui, Jésus nous invite à avoir une estime profonde pour ces témoins hors sérail : « Ceux qui ne sont pas contre nous sont avec nous ».

Mais alors, me direz-vous, à quoi sert l’Église si l’Esprit souffle et anime ceux qui ne sont pas en son sein ? Justement, nous servons à annoncer que Dieu veut le bien de tous et que son Esprit nous pousse à tisser une fraternité universelle, seule capable de mettre un terme aux affrontements entre tribus, entre partis, entre clans.

Sur ce sujet, il y a urgence, car lorsqu’on regarde l’état du monde, on est ulcéré par le manque patent de fraternité. La mondialisation nous rapproche, mais elle ne nous rend pas frères. D’où l’urgence de réinventer aujourd’hui un humanisme où les plus fragiles, les plus exposés, feront l’objet d’attention accrue.

C’est l’avertissement que lance Jésus avec force. « Si ton œil t’entraîne au mal, arrache-le, si ta main, ton pied font le jeu du Mauvais, coupe-les… » Ces paroles sont rudes. Bien entendu, il ne s’agit pas de nous mutiler physiquement, mais de couper les racines du mal en procédant à une bonne taille spirituelle… qui garde en nous ce qui est pour l’homme et coupe, élague, se débarrasse de ce qui est contre lui.

Cet évangile est sévère et provocant mais accueillons-le comme un vibrant appel à sortir de nos « guerres des boutons » et aussi à nous élever au-dessus de l’avidité immorale, où les uns sont repus à l’excès pendant que d’autres s’enfoncent dans la misère.

Aujourd’hui, le Seigneur pose les bases d’une culture qui doit rechercher la paix, la justice, le partage des richesses, une culture habitée par un esprit de fraternité. Mettons-nous à l’œuvre et réjouissons-nous que d’autres défendent eux aussi la dignité de tout homme et de tous les hommes.

Illustration : evangile-et-peinture.org